Pour en finir avec Who’s Next

 

Album fort d’une génération, « Who’s next », paru en 1971, achevait la mutation des Who. Groupe protéiforme, parti d’un R&B détonnant, s’étant essayé de façon profitable à l’Opéra Rock (« Tommy » en 1968), le groupe voit son public s’élargir au moment ou il délaisse son imagerie mod et son R&B de club pour accumuler les prestations musclées devant des foules de plus en plus nombreuses: Woodstock en 1969, Wight en 1970… l’incroyable reprise de « summertime blues » qui suit, tirée du premier, permet d’apprécier la puissance de feu incroyable du groupe à la fin des années 60:

« Who’s Next » prolonge d’une certain façon la démarche, en proposant une musique clairement Rock, simplifiée et taillée pour le succès; les harmonies vocales élaborées et les constructions élégantes des débuts sont déjà bien loin. Evidemment, cet album déchire les fans des Who; certains ont découvert le groupe avec, ont été séduits par sa puissance et sa violence glacée (la production de Glyn Johns). Les autres, les fans de la première heure, déplorent le changement de style, perçu comme une regression artistique. Aujourd’hui, la question taraude: que faut-il donc en penser, de ce fameux disque ?

Prétendre que Who’s next est un grand album malgré l’opportunisme évident de la démarche artistique des who à la fin des 60’s, et malgré effectivement la perte d’un certain charme des débuts, c’est s’attirer les foudres de beaucoup de fans du groupe. Mais, si on y réfléchit un peu, que pouvaient-ils attendre de leur groupe favori, ces valeureux fans ? Les Who, comme beaucoup d’autres, ne créaient pas la musique de leur époque : ils la jouaient; autrement dit ils suivaient, plutôt de belle façon, le vent musical. Ce qui s’est produit lorsque le groupe a opté pour un R&B sauvage et une imagerie Mod dans l’ère du temps, et ce qui s’est produit à partir de 1968 au moment ou Townsend s’est vu en Guitar Hero, alors même que ceux-ci devenaient des figures centrales du Rock. L’immobilisme étant en matière de pop-music la mort quasi-annoncée, les Who ont, au moment de concevoir Who’s next, cherché à s’adapter comme ils l’ont toujours fait.

Et puis, imaginait-on de toute façon le groupe, plus de 6 ans après sa création, stagner et répéter à l’envi son axiome Mod?

Une fois que l’on a pleinement réalisé le caractère à la fois logique et inévitable de cette mutation, on est à même d’aborder Who’s next dans le bon état d’esprit en se concentrant sur ce qui importe vraiment: la musique. Et celle-ci est au rendez-vous quoiqu’on en dise: le disque, parfois un peu maladroit, abrite de grands moments. Alors qu’il était prévu qu’il soit double et concept album, Who’s Next, amputé dans les grandes largeurs, se tient, encadré par les puissants et fédérateurs « Baba O’Riley » ou bien sur « Won’t get fooled again » dont l’extrait ci-dessous permet de visionner une version particulièrement intense.

La production glacée, presque minérale donne un son épique à ces morceaux. On a beaucoup reproché au groupe l’utilisation indélicate de synthétiseurs; pourtant ceux-ci sont exploités de façon plutôt intelligente (sauf éventuellement « going mobile »), essentiellement en boucle, pour leur texture et leur effet hypnotique; ils ne portent pas les morceaux et c’est parfait. Au delà des morceaux pré-cités, ce sont peut-être les titres de milieu d’album que l’on réécoute avec le plus de plaisir: « Getting in tune » et ses belles harmonies vocales, le sauvage « bargain » et l’acoustique « love ain’t for keeping », qui nous rappellent que Townsend restera comme un des rythmiciens les plus dynamiques du Rock, propulsé par le jeu frappadingue d’un Keith Moon très en vue sur l’album.

Pour découvrir http://www.deezer.com/fr/#music/the-who/who-s-next-213021

 

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